Nous devons l'expression école française de « spiritualité » à Henri Bremond qui l'emploie pour la première fois en 1925 suite à la parution de son troisième volume de l'Histoire littéraire du sentiment religieux. Ce courant s'inscrit au XVIIème siècle dans la mouvance du cardinal de Bérulle et de l'Oratoire de France qu'il fonda en 1611.

Bremond voit en Pierre de Bérulle le fondateur de cette école novatrice mais « fidèle aux principes essentiels de l'humanisme dévot » issu de la spiritualité de François de Sales. Le point de départ de l'école française selon Bremond se situe au niveau de la « révolution théocentrique » qui vient remettre Dieu au centre de la spiritualité chrétienne là où la Réforme et l'humanisme dévot dans son sillon placèrent l'homme au centre de leur approche. Ce théocentrisme a pris la forme chez Bérulle d'un christocentrisme : la spiritualité bérullienne est une spiritualité de l'adoration par la contemplation du Christ dans chacun des « états » et « dispositions » de son humanité. Bérulle propose ainsi aux fidèles de contempler l'« anatomie » des mystères de la vie du Christ, où Jésus est présenté comme l'« accomplissement de notre être », son « principe de subsistance ». C'est une spiritualité pratique qui permet une élévation de l'âme, dans le but d'atteindre un état d'« adhérence à Jésus-Christ ». Là où l'ascèse tend à contraindre le corps pour faire émerger l'âme, le bérullisme tend tout entier à fixer le fidèle dans des états, selon une perspective mystique.

Les grands représentants de l’École française et bérullienne sont : Pierre de Bérulle, Charles de Condren son successeur à l'Oratoire, Saint Vincent de Paul, Jean-Jacques Olier et Saint Jean Eudes. Ils constituèrent de véritables maîtres spirituels pour leur temps, soucieux de donner de bons prêtres à l'Église de France en fondant les premiers séminaires modernes voulus par le Concile de Trente ainsi qu'en évangélisant les pauvres et les campagnes.

La contemplation des mystères du Christ auquel ils tentent de se configurer devient le centre de leur vie spirituelle et de leur mission apostolique.

De nos jours, les héritiers de cette famille spirituelle se retrouvent au sein de diverses sociétés de vie apostolique où ils développent le charisme qui leur est propre afin de faire advenir le Royaume de Dieu.

 

Citons parmi elles :

  • La Société de l'Oratoire de Jésus fondée le 11 novembre 1611 par le cardinal Pierre de Bérulle : www.oratoire.org
  • La Congrégation de la Mission fondée en 1625 par Saint Vincent de Paul : www.cmglobal.org
  • La Compagnie des Prêtres de Saint-Sulpice (ou Séminaire Saint-Sulpice) fondée le 31 décembre 1641 par Jean-Jacques Olier : www.saintsulpicefrance.fr
  • La Congrégation de Jésus et Marie fondée par Saint Jean Eudes le 25 mars 1643 : www.cjm.org
  • Les Missions Etrangères de Paris fondées en 1663 : www.mepasie.org

Saint Jean-Baptiste de La Salle, lui-même formé au Séminaire Saint-Sulpice fondera quant à lui en 1680, les Frères des écoles chrétiennes dont le charisme est aujourd'hui encore d'assurer l'éducation des enfants défavorisés qui leur sont confiés.

 

Bibliographie non-exhaustive :

  • Pierre de Bérulle, Discours de l'état et des grandeurs de Jésus-Christ, Paris, 1623
  • Charles de Condren, L'Idée du sacerdoce et du sacrifice de Jésus-Christ
  • Jean Eudes, La Vie et le royaume de Jésus dans des âmes chrétiennes, 1637; Le Contrat de l'homme avec Dieu par le saint baptême ; Le Cœur admirable de la très Sainte Mère de Dieu, 1680
  • Jean-Baptiste de La Salle, Les Règles et Constitutions ; Méditations pour les dimanches et fêtes ; Méditation pour le temps de la retraite ; L'Explication de la méthode d'oraison ; Recueil de petits traités à l'usage des Frères
  • Jean-Jacques Olier, Le Catéchisme chrétien pour la vie intérieure, Paris, 1650 et 1656 ; Introduction à la vie et aux vertus chrétiennes, Paris 1657 ; La Journée chrétienne, Paris, 1655 ; Le Traité des saints ordres, Paris, 1676; Pietas Seminarii S. Sulpitii
    Vincent de Paul, Correspondance ; Entretiens ; Documents